Publié le : 26 août 20216 mins de lecture

Alors qu’aux États-Unis, l’écart entre les plus pauvres et les plus riches continue de se creuser, une étude de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) propose un état des lieux de la pauvreté en France. Ce sont les chiffres datant de 2008 qui y sont analysés pour arriver à ce constat : 7.8 millions de français vivraient en dessous du seuil de pauvreté, fixé à 949 euros mensuels. Parmi eux, la moitié aurait un niveau de vie inférieur à 773 euros par mois. Nouveaux riches, anciens pauvres et vice-versa…

Définir la pauvreté

Ce qu’il faut d’abord savoir, concernant les résultats présentés par l’Insee, c’est qu’ils traitent uniquement de pauvreté monétaire. Or, si l’on en croit le tout puissant Wikipedia, ce n’est pas seulement ça, la pauvreté : « La pauvreté est l’insuffisance de ressources matérielles, comme la nourriture, l’accès à l’eau potable, les vêtements, le logement, et des conditions de vie en général, mais également de ressources intangibles comme l’accès à l’éducation, l’exercice d’une activité valorisante, le respect reçu des autres citoyens. ».

Ensuite, les calculs de l’Institut concernent ce qui est appelé le niveau de vie, c’est à dire le revenu total dont dispose un ménage (y compris les prestations sociales) moins les impôts directs, en tenant compte du nombre de personnes dudit ménage. D’autre part, certaines évolutions récentes peuvent ne pas transparaître, les chiffres datant d’il y a deux ans, c’est à dire tout au début de la crise économique.

L’étude montre un revenu médian de 19 000 euros par an, soit 1580 euros par mois. La moitié des français vivent en dessous de ce niveau, et l’autre moitié au dessus. Le seuil de pauvreté correspond à 60% de ce revenu médian qui augmente depuis des années, contrairement à ce que l’on pourrait croire. Chose frappante, malgré un profond ressenti d’iniquité, les disparités entre les couches les plus riches et les plus précaires semblent stagner aux alentours de 3 depuis quinze ans.

Concernant les catégories de la population les plus touchées, ce sont les familles monoparentales qui sont heurtées de plein fouet par la précarité. Il s’agit le plus souvent d’une femme seule avec un ou plusieurs enfants, et un tiers d’entre elles vit en dessous du seuil de pauvreté. D’un point de vue géographique, l’Ile de France a la particularité d’être la région la plus riche du pays, mais aussi celle où on trouve les plus fortes inégalités.

Pour compléter les données communiquées par l’Insee, il est bon de se référer aussi au rapport 2009/ 2010 de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale (ONPES). Celui-ci relève des tendances dans la paupérisation, notamment l’augmentation du nombre de chômeurs non indemnisés et de dossiers de surendettement, ou encore l’explosion des sollicitations auprès des associations d’aide alimentaire.

Augmenter les minima ou instaurer un maximum ?

Pour lutter contre les inégalités et la pauvreté, l’idée d’un salaire minimum européen a été soulevée à plusieurs reprises par des organisations syndicales ou des partis politiques à travers l’Union. Mais le salaire minimum interprofessionnel, qui, pour les français, est un acquis de longue date (le premier SMIG ayant été fixé en 1950) est absent de plusieurs pays européens. Ainsi, l’Allemagne, la Suède ou la Finlande ne l’ont pas mis en place. Cette question se voit donc systématiquement récusée au nom de la sacrosainte compétitivité. Une uniformisation des salaires les plus bas semble donc impossible à mettre en œuvre au sein de l’Europe. Comment, alors, diminuer les inégalités qui sont parfois flagrantes ?

En prenant le problème dans l’autre sens, on peut se demander si les disparités ne pourraient pas être atténuées en limitant les revenus des dirigeants. N’ayons pas peur des mots : est-il envisageable d’instaurer un salaire maximum européen ? Et si oui, à quel niveau devrait-on fixer ce maximum ? Ce sont des questions qui, elles aussi, reviennent périodiquement sur le devant de la scène, sans toutefois qu’une réponse y ait été apportée à ce jour. Les partisans d’une telle mesure ne prétendent pas qu’elle solutionnerait tous les problèmes. Néanmoins, sa portée symbolique permettrait peut-être un plus grand sens de la justice sociale. Actuellement, un patron du CAC 40 gagne en moyenne, en un an, 366 ans de SMIC. Un calcul plutôt décou/rageant qui tend à décrédibiliser la notion de mérite et la valeur du travail.

Pour certains, c’est un salaire maximum qu’il faut mettre en place, avec une valeur indexée sur celle du salaire minimum. Mais alors par combien doit-on multiplier ? Par trois pour Olivier Besancenot, par dix selon Yves Cochet chez les Verts et par…240 pour la société de conseil aux actionnaires Proxinvest (soit une limite à plus de 3.5 millions d’euros par an) ! D’autres pensent que cela ne suffirait pas, puisqu’il serait encore possible de gagner des sommes astronomiques grâce à des bonus ou des primes. Alors, comme le suggérait Marianne en 2009, la solution serait-elle de taxer les très hauts revenus à hauteur de 80 ou 90% au-delà d’un certain niveau ?